La viande et l’avion, voilà les ennemis! Dans l’Obs 2948 du 29 avril au 4 mai 2021, Sébastien Billard et Rémi Noyon nous font partager les efforts et les découragements de cinq Français, soucieux de réduire leurs émissions individuelles de COշ. Ils s’efforcent de les ramener à deux tonnes par an. C’est en effet le quota fixé par l’accord de Paris signé en 2015 pour contenir l’augmentation de la température de la planète en dessous de 2°. Cette émission maximale de deux tonnes s’imposera légalement, pour chacun de nous, à partir de 2050.
Nos cinq compatriotes se sont donc inscrits à un visio-atelier, fort justement intitulé «2 tonnes». Ils y partagent leurs expériences vertueuses. Or, quoi qu’ils fassent, ils laissent encore une empreinte comprise entre 4 et 10 tonnes. Les principaux fautifs sont le steak frites et les voyages lointains: un kilo de viande rouge représente 35 kilos de COշ et un aller-retour Paris -New-York engloutit à lui seul la dose annuelle qui nous sera tolérée dans un peu moins de trente ans.
La comptabilité carbone gagne du terrain, l’article le montre bien. Mais comme ses auteurs le décrivent aussi, un autre phénomène lui emboîte le pas : c’est la réaction psychologique d’éco-anxiété qu’elle suscite. Ce travers est pointé par la sociologue Solange Martin, qui a longtemps travaillé pour l’ADEME: selon elle, la démarche est louable, mais elle laisse le poids de la culpabilité sur les seules épaules des particuliers, alors que les résultats probants viendront dès lors que l’industrie et l’agriculture seront décarbonées. Elle laisse aussi peser une responsabilité des habitants sur leur mode d’habitat. Comme si ces derniers avaient choisi de vivre entassés dans des immeubles passoires !
Il n’empêche, la discipline fera de moins en moins sourire à l’avenir. Car nous y viendrons tous. Pour ceux qui ont pris de l’avance, la transition sera plus douce.