Lors de la conférence de Presse à l’Elysée de Emmanuel Macron pour présenter la présidence française du Conseil de l’UE, celui ci annoncé vouloir instaurer une taxe carbone aux frontières de l’Union européenne « Nous impulserons la mise en place d’une taxe carbone européenne qui doit permettre de compenser le différentiel entre les exigences de décarbonations des industries européennes et nos importations ». Chiche. A suivre…
Dans une interview au journal Le monde le 8 novembre 2021, Cécilia Bellora, économiste au Centre d’études prospectives et d’informations internationales, expliquait que «pour l’Europe, la taxe carbone aux frontières devrait permettre de réduire de moitié les délocalisations».
Par ailleurs, elle précisait le mode de calcul qui serait utilisé pour cette taxe carbone aux frontières : « Pour avoir des ordres de grandeur, prenons un exemple : les trois premiers pays producteurs d’acier au monde émettent environ 2 tonnes de CO2 pour produire une tonne d’acier. A terme, l’ajustement carbone pourrait imposer aux importateurs d’acheter 2 quotas carbone pour chaque tonne d’acier importée, soit 120 euros environ au prix d’aujourd’hui, mais certainement plus dans quelques années. Ces 120 euros correspondent à environ 10 % du prix de la tonne d’acier. Le nombre de quotas à acheter sera en réalité ajusté aux émissions réelles de chaque lieu de production. »
Selon une simulation, cela devrait permettre de réduire de moitié les fuites de carbone ou les délocalisations d’activités à l’horizon 2040.
« Si l’ajustement aux frontières entrait en vigueur dès 2026, ajoute l’économiste, il faudrait s’attendre à ce que les industriels européens achètent moins de matières et de produits à l’étranger. D’après nos modèles, si les entreprises ne bénéficiaient pas d’allocations de quotas de CO2 gratuits, leurs importations pourraient baisser de l’ordre de 8 % en moyenne d’ici à 2040, et de 16 % dans la métallurgie. Nous devrions également assister à des hausses de prix, et pas seulement dans les secteurs de l’acier, de l’aluminium, du ciment, des engrais et de l’électricité. A l’aval, un constructeur automobile paiera ses intrants plus cher et devra faire face à la concurrence de véhicules venus de pays où l’on ne paie pas de taxe carbone. »
Ce mécanisme peut-il être efficient en termes de décarbonation de l’Europe ? Selon la simulation, il devrait permettre de réduire de moitié les fuites de carbone ou les délocalisations d’activités à l’horizon 2040. Cet instrument aura donc un rôle-clé à jouer en matière d’acceptabilité des entreprises face à la hausse des prix des quotas de carbone. Il n’est cependant pas une fin en soi et ne suffira pas à lui seul à faire reculer les émissions globales. Comme les émissions européennes représentent moins de 10 % des émissions mondiales, son impact à la baisse ne devrait être que de 0,9 % sur les rejets mondiaux à l’horizon 2040.