Mercredi 22 janvier 2025
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Il est toujours temps de faire ses yaourts soi- même

Dans un article du journal Le Monde, on constate que la France est non seulement un grande consommatrice de produits laitiers emballés dans du polystyrène. Mais qu’en plus, elle en rejette 15 milliards et ne sait toujours pas les recycler. Et ce n’est pas demain la veille .

Le matériau, très polluant et qu’aucun centre de tri en France ne sait recycler, reste très utilisé pour les emballages de produits laitiers et carnés. Une « exception française » dénoncée, alors que s’ouvrent les négociations pour aboutir à un traité international sur le plastique.

Jimmy Pahun est député (MoDem) du Morbihan. Avant de s’embarquer en politique, il a été navigateur : une transat AG2R remportée avec Alain Gautier, un tour de France à la voile et dix victoires au Spi Ouest-France. Celui qui a découvert l’étendue de la pollution plastique en sillonnant les mers comptait bien ajouter une ligne à son palmarès: l’interdiction des emballages en polystyrène.

L’enjeu est de taille : on les retrouve dans la plupart des 15 milliards de pots de yaourt achetés (et jetés) chaque année en France qui finissent dans leur très grande majorité au mieux incinérés, au pire dans la nature. Le polystyrène illustre cette menace protéiforme contre laquelle les Etats semblent enfin décidés à agir. Le principe d’un traité international sur le problème plus large de la pollution plastique a été validé en mars sous l’égide des Nations unies et un premier round de négociations s’est ouvert le 28 novembre à Punta del Este, en Uruguay.

Le député Pahun ne fera pas partie de la délégation française. Il a fait le tour des parlementaires et des rédactions pour défendre sa «proposition de loi visant à lutter contre les plastiques dangereux pour l’environnement et la santé», martelant qu’«en 2050, l’océan comptera davantage de plastique que de poissons» et alertant sur la menace spécifique du polystyrène, ce «matériau toxique qui constitue plus du tiers des plastiques retrouvés dans l’environnement».

Las. La proposition de loi a été sabordée par son propre camp. Certes, elle a été adoptée en toute discrétion le 6 octobre en première lecture par les députés mais après avoir été vidée de sa substance. Exit toute référence au polystyrène. A la demande des élus de la majorité présidentielle, l’article premier visant «à interdire les emballages alimentaires constitués de polystyrène à compter du 1er janvier 2025» a été entièrement réécrit : sont désormais concernés par l’interdiction «les emballages en plastique à usage unique non recyclables». Une nuance qui change tout car les emballages en polystyrène sont aujourd’hui théoriquement «recyclables» même si dans les faits moins de 2 % sont recyclés dans des usines en Allemagne et en Espagne.

«C’est une déception très forte et une incompréhension très forte», réagit Henri Bourgeois-Costa, chargé du plaidoyer à la Fondation Tara Océan, qui avait travaillé sur la proposition de loi. «Le gouvernement ne voulait pas de l’interdiction», indique-t-on dans l’entourage du député. «Le gouvernement et mon parti m’ont fait comprendre qu’on ne pouvait pas changer la loi au milieu du chemin», témoigne Jimmy Pahun. Dans le cadre de l’examen du projet de loi climat et résilience, en 2021, le député avait déjà déposé un amendement pour interdire le polystyrène. Il avait cette fois été retoqué par le Sénat.

Mais alors, qu’est-ce qui coince en France avec le polystyrène ? « Ça coince, car c’est 15 milliards de pots de yaourt », répond, sibyllin, l’ancien navigateur, que son entourage dit heurté par ce nouveau revers. « Il y a eu un intense lobbying de la plasturgie, décrypte Magali Ringoot, de l’association Agir pour l’environnement. L’enjeu est de préserver les intérêts des industriels du déchet à usage unique qui peuvent faire commerce de la mise sur le marché de plus de 15 milliards de pots de yaourt en France chaque année.»

Pour Henri Bourgeois-Costa, ce revirement illustrele «double discours» du gouvernement sur la fin du plastique à usage unique, programmé à l’horizon 2040 : «On annonce des objectifs ambitieux mais on ne se donne pas les moyens de les tenir ; on n’y arrivera pas si on n’abandonne pas un certain nombre de matières, à commencer par les pires.»

Contacté, le ministère de la transition écologique n’a pas répondu à nos sollicitations. Certains pays comme les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l’Espagne et le Portugal ont déjà franchi le pas : les géants de l’agroalimentaire sont passés à d’autres plastiques recyclables et moins problématiques pour l’environnement comme le polyéthylène téréphtalate(PET). «Le pot de yaourt individuel, c’est une exception française, rappelle Henri Bourgeois-Costa, ce n’est pas la norme en Europe. Dans beaucoup de pays, on privilégie des pots plus volumineux de 400 ou 500 ml, c’est autant de plastique en moins.»

Les pots de yaourt sont une menace pour l’environnement. Bien que le polystyrène ne représente que 16 % des emballages en plastique mis sur le marché, il constitue plus du tiers des plastiques retrouvés dans la nature. Une fois fragmenté, le polystyrène a une haute toxicité. Pour les milieux naturels mais aussi pour l’homme : le styrène est classé cancérogène probable et il est suspecté d’être toxique pour la reproduction.

«Chaque seconde, 500 pots de yaourt sont jetés en France », rappelle Magali Ringoot. Le polystyrène, qui est aussi utilisé dans les barquettes pour la viande, représente 42 % des plastiques incinérés et 27 % des mises en décharge. Plaie pour la planète, les pots de yaourt perturbent aussi le système du recyclage et nuisent au développement des filières de traitement des déchets ménagers.

L’industrie des produits laitiers est très attachée au polystyrène: très léger et facilement cassable, il permet de détacher un yaourt de son lot. Ce sont ces propriétés qui rendent son recyclage particulièrement complexe. Lors de la collecte, les pots peuvent se casser en petites particules qui ne pourront pas être détectées sur les chaînes de tri. Pour corser davantage l’opération, un pot de yaourt n’est pas seulement composé de polystyrène. Il est entouré d’une membrane généralement en papier et d’un opercule, souvent recouvert d’une fine pellicule d’aluminium.

Si bien qu’aujourd’hui, aucun centre de recyclage ne sait traiter les pots en polystyrène en France. Ceux qui ne sont pas brûlés ou enfouis (moins de 2 %) sont expédiés en Espagne et en Allemagne dans des centres spécifiques. Mais là aussi, le rendement de ce « recyclage » est aussi faible que ses débouchés. Les granulés issus du processus de recyclage sont de si piètre qualité qu’ils ne peuvent pas servir à produire d’autres emballages alimentaires. Ils sont tout juste bons à fabriquer des cintres ou des pots de fleurs qui, une fois endommagés, ne pourront plus être recyclés.

« On est dans le décyclage, pas dans le recyclage », commente Nathalie Gontard, directrice de recherche à l’Institut national de la recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae). Pour cette spécialiste mondiale des emballages plastique, le recyclage du polystyrène comme des autres plastiques est une « illusion » : « A la différence du verre, on ne sait pas reproduire le plastique à l’identique ; à la fin cela reste toujours un déchet. »

Syndifrais, le syndicat qui représente les professionnels des produits laitiers frais (Yoplait, Lactalis, Senoble, Rians…), s’accroche pourtant au polystyrène de ses pots de yaourt, qu’il considère «optimisé tant du point de vue environnemental qu’économique». Il refuse de lui substituer le verre, jugé trop lourd et énergivore. «Avec un kilo de verre, on fabrique 2 à 3 fois moins de pots qu’avec du plastique. Le recyclage de ces pots en verre a ainsi un impact environnemental plus élevé que celui du polystyrène», soutient même Citeo, l’éco-organisme financé par le secteur de la grande distribution pour mieux gérer ses déchets. L’Allemagne a trouvé la parade: la consigne. Le carton est une autre piste. Mais elle n’a pas non plus les faveurs de Syndifrais; la France manquerait de fabricants de pots en carton.

Syndifrais pousse depuis plusieurs années pour la création d’une filière française de recyclage du polystyrène. En 2020, il s’est allié à Citeo et à d’autres entreprises utilisatrices d’emballages en polystyrène (Andros, Bigard…) au sein du consortium PS25. Ce dernier assure que les conditions sont aujourd’hui réunies pour que cette filière soit opérationnelle à partir de 2025… et donc échapper à l’interdiction.

Première condition: la collecte. Citeo estime que la simplification du geste de tri (tous les emballages, y compris les pots de yaourt, dans la poubelle jaune) sera étendue à tous les Français en 2023 – contre 70 % aujourd’hui. Deuxième condition : le tri. Un premier centre de «surtri» (capable de trier le polystyrène des autres emballages) devrait entrer en fonction en mai 2023. Troisième condition: trouver une technologie capable de recycler le polystyrène (c’est-à-dire avec un retour au contact alimentaire) à une échelle industrielle. Syndifrais et le consortium PS25 mettent en avant des annonces de création d’unités de recyclage chimique du polystyrène en France (Michelin avec le canadien Pyrowave) et en Europe (Indaver et Trinseo en Belgique) en 2023 et 2024.

Danone dubitatif sur le recyclage chimique

«Le recyclage chimique est une illusion coûteuse et une impasse technologique, commente Henri Bourgeois-Costa, de la Fondation Tara. Des pays comme les Etats-Unis ou le Canada en sont revenus.» Danone, qui ne fait pas partie du consortium PS25, semble aussi dubitatif. «Nous nous sommes fixé comme objectif de ne plus utiliser le polystyrène en raison des perspectives négatives de recyclage de ce matériau», indique-t-on chez Danone.

En 2020, le géant français de l’agroalimentaire avait annoncé sa volonté de se passer du polystyrène pour tous ses pots de yaourt d’ici à 2025 (et dès 2024 en Europe). Entre-temps, son patron, Emmanuel Faber, a été débarqué et le cap pourrait changer: «Ces perspectives évoluent aujourd’hui dans certains pays. Nous suivons ces évolutions, et nous examinons ce qui fait sens en fonction du contexte local», précise l’entreprise.

Pour Nathalie Gontard, la création d’une hypothétique filière de recyclage du polystyrène «ne résoudra absolument pas le problème de la pollution plastique». Pour deux raisons principales: «D’une part, elle ne fera pas disparaître le danger lié à la toxicité des particules de plastique et d’autre part, pour alimenter ces usines et rendre la filière fiable, il faudra produire encore plus de déchets.» De son côté, Jimmy Pahun se veut « un éternel optimiste»: le député ne croit pas qu’une telle filière sera prête d’ici à 2025, ce qui acterait enfin son interdiction et la fin de l’addiction de la France au pot de yaourt.

Quel est le coût d’un yaourt fait maison ?

Selon le site www.lacuisineensemble.fr, l’économie est réelle et le bilan carbone et écologique spectaculaire.

« Pour faire ses propres yaourts, plusieurs ingrédients sont indispensables et doivent être pris en compte dans le calcul :

  • Le lait : 0,70€ par litre.
  • Les ferments lactiques : on peut utiliser un sachet avec des ferments (0,60€) ou 1 yaourt issu du commerce (0,11€ en prenant un yaourt premier prix).
  • L’électricité consommée par l’appareil : 6 centimes par heure de fonctionnement, que l’on va laisser fonctionner 8 heures soit 0,48€ par préparation.
  • Facultatif : vous pouvez aussi prendre en compte le coût de l’appareil, mais dans ce cas c’est un calcul sur le long terme.

Petite précision concernant le yaourt qui remplace le sachets de ferments lactiques, le premier doit être issu du commerce car il en contient davantage. Ensuite, vous pouvez utiliser un yaourt fait-maison pour les 3 ou 4 productions suivantes. Au-delà, les nouveaux yaourts produits ne contiennent plus assez de ferments.

On peut fréquemment lire que faire ses yaourts représente une économie de 50% en moyenne. C’est un peu trop optimiste selon-nous, mais l’économie est d’au moins 30% si on se base sur nos propres calculs.

Type de yaourt maisonprix par potÉconomie réalisée
lait classique et yaourt premier prix comme ferment0,16€5 centimes / pot
lait bio et yaourt bio comme ferment0,21€14 centimes par pot
lait classique, yaourt premier prix comme ferment et cuillère confiture (15 grammes)0,22€18 centimes par pot

L’économie ne paraît pas énorme comme cela, mais il faut savoir que certaines personnes en mangent 2 à 3 par jours. Et il faut multiplier ça par chaque membre de la famille. Sur une année entière, cela représente un véritable budget et les faire soi-même est bien plus rentable.

Dans tous les cas, cela vous permet de contrôler exactement la composition de vos yaourts et de les préparer comme vous les aimez.

Nos conseils :

  • Utilisez un yaourt plutôt que des ferments en sachet, c’est beaucoup moins cher. Mais vous pouvez toujours avoir une boîte de sachet dans votre placard dans le cas où vous auriez mangé le dernier yaourt restant sans faire exprès !
  • Ne réutilisez pas plus de 4 fois un yaourt maison comme ferment afin que le résultat soit toujours au rendez-vous.
  • Jouez sur le temps de fermentation pour avoir des yaourts plus ou moins fluides. Plus vous augmentez la durée, plus ils deviendront fermes (et indirectement, cela joue sur le prix par pot par rapport à l’électricité utilisée).

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